Pourquoi les transports publics perdent des parts de marché

Il existe une tendance quasi-universelle en faveur de la possession de véhicules à moteur privés et contre l'utilisation de formes "conventionnelles" de transports publics (tels que le bus ou le métro. Diverses théories ont été avancées pour expliquer ce phénomène. Aux Etats-Unis, il a été suggéré que le déclin des transports publics est le fruit d'une "conspiration" organisée. D'autres ont accusé le "subventionnement injuste" de l'habitat à plus faible densité démographique.

Si l'on comprend comment les systèmes de transport diffèrent dans leur capacité à satisfaire les diverses caractéristiques de la mobilité, on aboutit à une explication beaucoup plus simple - et bien moins sinistre. Cela aide également à identifier les caractéristiques qui devraient être celles des formes "non conventionnelles" de transport public pour concurrencer la voiture privée avec efficacité.

La croissance du nombre de véhicules à moteur privés découle directement des avantages et des agréments que procure ce type de véhicules en termes de mobilité. Grâce à leur flexibilité quant aux horaires et au choix de la destination, les automobiles offrent les meilleurs avantages possibles qui peuvent être retirés de la mobilité motorisée. Ces avantages - heure, confort et agrément du déplace- ment, statut et prestige - ne sont pas entièrement liés à la mobilité "fonctionnelle".

L'automobile est un moyen de transport qui est souvent supérieur aux autres en termes d'horaires et de frais supplémentaires, facteurs sou- vent considérés comme déterminants dans le choix des voyages au niveau des déplacements individuels. Les déplacements en véhicule privé offrent en outre d'autres types de services qui sont importants aux yeux des consommateurs. Par exemple, alors que des contraintes dues à la capacité des parkings peuvent se faire sentir, les véhicules privés permettent souvent d'arriver à destination sans encombre, avec un temps de marche et d'attente minimum. Le voyage en voiture donne également une flexibilité totale en termes d'horaires et de trajet.  On peut notamment suivre un itinéraire comprenant un ou plusieurs arrêts intermédiaires, de sorte qu'un seul trajet peut servir des fins multiples sans grande rupture. Par exemple, en se rendant de la maison au travail, on peut déposer les enfants à l'école, faire ses courses   ou régler d'autres affaires personnelles. Enfin, le niveau de confort et d'agrément est  généralement supérieur avec les véhicules  privés.

Aux yeux du consommateur, cependant, le véhicule à moteur privé a bien plus qu'une valeur utilitaire. De nos jours, dans bien des sociétés, si ce n'est la plupart, le fait de posséder un véhicule privé ne signifie pas seulement l'accession à la classe moyenne, mais peut servir à "réussir" dans cette classe, en donnant un accès potentiel à de meilleures opportunités d'emploi et à d'autres "musts" de la classe moyenne, tels que la possibilité de faire ces courses dans un grand centre commercial.

Le contraste entre les attributs du véhicule à moteur privé et ceux des transports publics à itinéraires et horaires fixes est frappant. Pour commencer, de nombreux déplacements ne sont pas envisageables en transports publics. Dans le cas contraire, l'usager doit trouver un arrêt qui lui convienne au départ comme à l'arrivée et il doit attendre l'arrivée d'un véhicule. Dans l'idéal, le service est ponctuel et l'usager dispose d'assez de flexibilité quant aux horaires, de connaissances et d'informations pour minimiser le temps perdu à attendre. Mais ces conditions ne sont pas toujours réunies et le peu de fiabilité du service peut conduire à de longues attentes. En dehors des heures de pointe, le service peut être limité, et il se peut qu'aucun service de nuit ne soit assuré.